25 octobre 2011

Burn-Out : Enseignants Exposés

Collèges et lycées: 17% des professeurs victimes d'épuisement (étude)


Les pro­fes­seurs de col­lèges et lycées sont 17% à être tou­chés par le "burn-out", terme anglo-saxon dési­gnant l'épuisement phy­sique, men­tal et émotion­nel, contre 11% dans les autres pro­fes­sions, selon une étude de deux spé­cia­listes révé­lée dans Le Monde daté jeudi.

Ce phé­no­mène "touche 17% des pro­fes­seurs, contre 11% dans les autres pro­fes­sions. Et près de 30% des ensei­gnants inter­ro­gés ont dit son­ger, sou­vent, à quit­ter le métier", explique Georges Fotinos, ancien ins­pec­teur géné­ral de l'Education natio­nale et coau­teur de cette étude.

"Les dif­fé­rences entre les sexes et entre les établis­se­ments –en zone urbaine, en zone rurale, en ZEP...- sont moins déter­mi­nantes que le fac­teur âge. Les jeunes en des­sous de 30 ans sont plus expo­sés", ajoute-t-il.
Cette enquête a été réa­li­sée par M. Fotinos et José-Mario Horenstein, méde­cin psy­chiatre à la mutuelle MGEN, auprès de 2.100 per­son­nels (sur­tout des ensei­gnants) de 400 lycées et col­lèges, en col­la­bo­ra­tion avec la MGEN, la banque Casden et l'Ecole supé­rieure de l'éducation natio­nale (Esen).

Elle va paraître dans un rap­port à venir inti­tulé "La qua­lité de vie au tra­vail dans les lycées et col­lèges. Le burn-out des enseignants".

"La mon­tée des risques de burn-out est bien connue des pays anglo-saxons et asia­tiques où ils sont dus notam­ment à la recherche de la per­for­mance", a expli­qué à l'AFP Françoise Lantheaume, socio­logue à Lyon-2 et auteur, avec Christophe Hélou, de "La souf­france des ensei­gnants. Une socio­lo­gie prag­ma­tique du tra­vail ensei­gnant" (Puf, 2008).

En France, "les ensei­gnants fran­çais expriment mas­si­ve­ment des sen­ti­ments d'usure, d'impuissance et d'abandon. Je l'ai constaté il y a une dizaine d'années déjà en col­lèges et lycées, je le vois main­te­nant en pri­maire", a-t-elle ajouté.


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source de l'image :  http://www.assistantplus.be/ne_considerez_jamais_un_burn_out_comme_un_simple_stress



Le billet d'Audrey Pulvar

émission de radio "Etre et avoir", jeudi 20 octobre 2011, sur France Inter

 http://www.franceinter.fr/emission-le-billet-d-audrey-pulvar-etre-et-avoir

Savez-vous que 54 enseignants ou personnel encadrant de l’école se sont donnés la mort dans l’enceinte de leur établissement en 2009 ? 54 personnes qui se suicident dans l’école, le collège ou le lycée où ils travaillent. C’est plus d’une par semaine. Je n’ai pas trouvé les chiffres de 2010. Mais j’en ai trouvé un, publié par l’Inserm, qui date de 2002 et on peine à croire que la situation se soit améliorée, en 10 ans : 39 pour 100 000 personnes.


C’est le nombre de cas de suicides dans la profession. Un taux deux fois et demi plus élevé que dans le reste de la population. Plus élevé qu’à France Télécom, plus que dans la police.

Les profs ne vont pas bien. Ils sont à bout. Déconsidérés par le pouvoir, non-remplacés, une fois sur deux en cas de départ à la retraite, débordés par des classes de plus en plus lourdes, en incapacité devant l’irruption, au sein de leurs classes des problèmes de l’extérieur (violence, peur, dépression, exclusion, précarité, certains élèves ont le sac plus lesté que d’autres. Fustigés, décrits comme d’éternels fainéants privilégiés les enseignants de nos enfants, sont surtout épuisés. En situation de surmenage, de fragilité psychologique intense, découragés. C’est ce que l’on peut lire dans le quotidien Le Monde daté d’aujourd’hui, qui rend partiellement compte d’une enquête menée dans 400 collèges et lycées, par un ancien inspecteur général et un médecin psychiatre.

Evidemment et heureusement, tous ne sont pas sur le point de commettre un geste fatal. Mais chacun a, un jour, ressenti un sentiment de profond découragement devant l’impossibilité, malgré une forte implication, de faire son métier comme on imagine qu’un professeur le fait. « Solitude » est un mot qui revient dans toutes les bouches. Les jeunes enseignants, ceux de moins de trente ans, novices, sont les plus touchés.
Transmettre, instruire, écouter. Sur le papier, oui. Dans la réalité, pas toujours, pas souvent, disent les moins optimistes. Suppressions de postes, locaux délabrés, perte d’autorité, programmes changeant, semaines surchargées pour des élèves à fleur de peau.

Une enseignante s’est immolée par le feu, à Béziers,  il y a une semaine. « C’est pour vous » ont été ses derniers mots. Pour qui ? Lire les différentes interprétations de cette ultime phrase, dans le quotidien Libération de ce matin. Certains y voient un geste politique, devant l’incurie générale.  D’autres soulignent qu’on savait cette enseignante fragile.  Mais qu’y faire. « Aujourd’hui nous n’avons plus les moyens de protéger les enseignants fragiles », s’écrie un chef d’établissement. Alors c’est « débrouille toi ma grande, remonte à cheval mon gars ». Haut les cœurs ! Et un dernier chiffre pour la route : chaque médecin du travail a en charge 17.000 enseignants.

© Audrey Pulvar


 http://www.neoprofs.org/t39271-burn-out-des-enseignants
témoignages de professeurs sur leurs conditions (parfois très difficiles) de travail, pouvant conduire ceux-ci jusqu'au point de rupture.


Collèges et lycées : un enseignant sur six "victime d’épuisement"

France Info - 19 octobre 2011


"Victime d’épuisement" : traduction française du "burn-out", terme anglo-saxon qui désigne l’épuisement physique, mental et émotionnel.
Dans les collèges et lycées, le phénomène touche 17% des enseignants (soit un sur six) contre 11% dans les autres professions, révèle une étude citée par le quotidien Le Monde.

Près de 30% des enseignants interrogés déclarent songer, souvent, à quitter le métier. Et ils sont 17% (un sur six) à se déclarer "victimes d’épuisement", le terme français qui désigne le "burn-out" anglo-saxon.
Etonnamment, l’implantation des établissements (en zone urbaine, en ZEP ou en zone rurale) et le sexe des enseignants jouent peu. En revanche, le facteur d’âge est déterminant : les jeunes profs, en dessous de 30 ans, sont plus exposés.
L’étude a été réalisée auprès de plus de 2.000 enseignants de 400 collèges et lycées, par un ancien inspecteur général de l’Education nationale et un psychiatre de la MGEN (mutuelle des enseignants). Le Monde en livre les grandes lignes dans son édition datée de jeudi, mais elle paraîtra intégralement dans un rapport intitulé : La qualité de vie au travail dans les lycées et collèges. Le burn-out des enseignants.

Témoignage d’une de ses profs en souffrance  Isabelle Chaillou  (1'16")


Trop peu de médecins du travail

Les enseignants interrogés expriment pêle-mêle "des sentiments d’usure, d’impuissance et d’abandon", relèvent les auteurs. Ce phénomène de "burn-out" est bien connu dans les pays asiatiques et anglo-saxons. Il est dû notamment à la recherche de la performance. Apparu il y a une dizaine d’années dans les collèges et lycées français, il prend de l’ampleur et gagne maintenant les écoles primaires, selon les auteurs de cette étude.
En première ligne, les "médecins de prévention" sont de plus en plus submergés par l’envolée des risques psychosociaux. Si bien qu’ils n’ont plus le temps d’exercer leur cœur de métier, la médecine de prévention, relève de son côté la médiatrice de l’Education nationale dans son rapport annuel.
En 2009, Monique Sassier avait recommandé l’embauche de 80 médecins supplémentaires, au minimum – ils étaient 70 à l’époque, avec chacun 10.000 agents à suivre. Deux ans plus tard, les recteurs n’ont réclamé que 39 postes, et recruté seulement 17 médecins, selon le Snes (premier syndicat enseignant du secondaire).
Gilles Halais, avec agences

Education : tu enseigneras dans la douleur... - Lucie Delaporte, "Médiapart", 20 octobre 2011


Pour lire cet article sur le site de Médiapart

Jeudi 20 octobre, cela fait juste une semaine qu’au lycée Jean-Moulin de Béziers, une enseignante de mathématiques, Lise Bonnafous, 44 ans, a mis fin à ses jours en s’immolant en pleine cour de récréation. Ici, les cours n’ont pas repris et près de 2.000 personnes ont participé à la marche blanche organisée à Béziers, mardi.

Manifestation à Béziers, mardi. Manifestation à Béziers, mardi.© (F3) Ailleurs dans la communauté éducative, les actions, parfois très spontanées, se sont multipliées : débrayage d’une heure, minutes de silence, port de brassards blancs... Preuve d’une grande émotion partagée, ce jeudi, beaucoup d’enseignants vont marquer leur solidarité avec leur collègue. « Elle a quand même dit avant de mourir “Je le fais pour vous”, son acte a un sens », souligne, par exemple, un prof sur un forum de discussion. Un autre s’interroge : « Combien de drames va-t-on encore attendre avant de dire “Tiens, il y a des soucis dans le milieu enseignant ?” Tout cela me donne la chair de poule... »

Georges Fotinos, ancien inspecteur général et auteur du rapport La qualité de vie au travail dans les lycées et collèges. Le burn-out des enseignants – exclusion des élèves (lire ici), estime que « 17 % des professeurs » sont victimes de burn-out (contre 11 % dans les autres professions). Et que « près de 30 % des enseignants » interrogés pour cette enquête ont dit « songer, souvent, à quitter le métier ».

Il y a quelques mois, alors que nous enquêtions sur les démissions de professeurs, nous avions rencontré Martine, enseignante chevronnée de français. Après plus de dix ans dans des établissements classés difficiles comme la cité scolaire Y du XIXe arrondissement de Paris, elle avait choisi de mettre un terme à sa carrière. La tragédie de l’enseignante de Béziers lui remémore ses souffrances : la tentative de psychiatriser le cas Lise Bonnafous, dont le ministre Luc Chatel a immédiatement fait une « personne en état de grande fragilité », lui rappelle le discours qu’on lui tenait à l’époque.

« La médecine du rectorat m’avait mise en arrêt maladie en précisant que mon état était "non-imputable” à mon service », raconte-t-elle. Difficile de politiser le débat sur l’enseignement quand l’institution n’a de cesse de vous renvoyer à vos « problèmes personnels ». « En clair, le problème, c’est moi, et pas mes conditions de travail ! » Comme pour les salariés de France Télécom. Pourtant Martine, qui durant ces dix années a pris des antidépresseurs, constate aujourd’hui : « Depuis que j’ai quitté l’enseignement, je n’ai plus besoin d’antidépresseurs. »

Masquer à tout prix les difficultés
« Très exigeante », « à l’ancienne », le discours qui s’est peu à peu développé sur l’enseignante de Béziers, que certains parents ont aussi décrite comme « peu aimée de ces élèves », a aussi sonné familièrement chez Martine. « Il est aujourd’hui mal vu d’être un prof exigeant, et non pas tellement par les élèves ou les familles d’ailleurs, mais par l’institution. C’est exactement ce que j’ai vécu : on me reprochait mes moyennes inférieures aux autres – je refusais de mettre la moyenne à un élève qui faisait trois fautes par phrase. On me disait que je passais trop de temps à expliquer des points de grammaire difficiles, alors que si les élèves décrochaient, il fallait passer à autre chose. »

Le plus difficile, raconte-t-elle, a été la perte progressive du sens même de sa mission d’enseignante. Les expériences pédagogiques (« 4e sport... la 6e expérimentale où il s’agissait d’apprendre à ces élèves à compter en maniant des ballons de foot... », détaille-t-elle acerbe) se résument selon elle à mettre dans ces classes les élèves en grande difficulté, « ceux qui ont besoin, encore plus que les autres de cadres bien structurants. Le pire, c’est que beaucoup n’avaient rien demandé et ont très mal vécu d’être mis dans “les classes de débiles” ».

Devant tant d’incompréhension, peu à peu, le dialogue avec sa hiérarchie s’est étiolé. « Les chefs d’établissement ont leurs contraintes. Il ne faut surtout pas faire trop de conseils de discipline parce que cela remonte au rectorat et peut nuire à l’image de l’établissement. Pareil pour le niveau des élèves, il faut à tout prix masquer les difficultés. On passe sur tout. Le moyen de tenir pour beaucoup de mes collègues, c’était de se voiler la face. Moi je n’y arrivais plus. »

Face à ces conditions de travail de plus en plus pesantes – « Il était très difficile d’obtenir le carnet de liaison de mes élèves, demander à un élève d’enlever sa casquette pouvait faire toute une histoire » –, sa hiérarchie lui demande simplement d’être indulgente. Parallèlement, les collègues, souvent jeunes dans ces établissements difficiles où ceux qui ont un peu d’ancienneté prennent leurs jambes à leur cou, n’osent pas dire les difficultés qu’ils rencontrent.

« Une réunion a par exemple été organisée pour parler d’une classe totalement ingérable. Or devant la direction, chacun a raconté comment, dans sa classe, tout se passait merveilleusement bien ! Les profs ont complètement intégré l’idée que si cela se passe mal, c’est uniquement de leur faute. » Dans ce contexte, celui qui dénonce des situations inacceptables finit bien vite par déranger.

Provoquer une prise de conscience
Alors qu’elle y pensait depuis plusieurs mois, un événement a précipité sa décision de quitter un métier qui était aussi une vocation. « Il y a eu ce conseil de discipline pour une élève qui avait griffé au visage un prof alors qu’il tentait de lui confisquer son portable. Un élève avait filmé la scène sans que cela semble poser de problèmes à personne. Tout le monde a ri quand je me suis étonnée qu’on ne cherche pas les responsables. »

Devant le manque de soutien de sa hiérarchie, elle claque donc bruyamment la porte.

Elle aussi voulait provoquer une prise de conscience. Ne pas partir sur la pointe des pieds, comme beaucoup d’enseignants écœurés. Une de ses anciennes collègues, consciente que la phrase résonne aujourd’hui étrangement, se souvient : « Elle nous avait dit : “Il faudrait faire un truc, je ne sais pas, on devrait peut-être s’immoler”... » A l’époque, fin décembre 2010, l’immolation du jeune Mohammed Bouazizi en Tunisie et l’immense révolte qu’elle suscite sont dans tous les esprits. L’idée du sacrifice qui réveille les consciences, Martine, qui était alors au bord du gouffre, y a pensé. « Je me suis dit : qu’est-ce qu’il nous reste pour nous faire entendre ? » Elle a finalement écrit une lettre de démission à son chef d’établissement en prenant soin de la rendre la plus publique possible.

Elle, toujours très bien notée par son inspection, toujours saluée par ses collègues comme « une excellente prof », pointe le « climat délétère qui règne dans l’établissement : incivilités, refus d’obéissance, insultes, violences à l’égard des adultes se sont banalisés au point que les élèves, se sentant dans une situation de toute-puissance, n’ont même plus conscience de la gravité de leurs actes. Un tel désordre règne dans les escaliers et les couloirs, qu’il nous est impossible de circuler sans être bousculés, raillés, invectivés, les bagarres y éclatent plus que quotidiennement. Cette situation de violence tant physique que verbale ne devrait pas être ».

Et poursuit ainsi : « Je refuse de continuer à assister à la complaisance avec laquelle certains adultes confortent ces enfants dans leurs dérives au lieu de tout faire pour les aider à en sortir. Je refuse de continuer à assister, impuissante, à ce gâchis généralisé, nos élèves les plus fragiles étant les premières victimes de notre incapacité, voire notre réticence, à instaurer les conditions nécessaires à leur apprentissage. Je refuse de continuer à participer de ce spectacle affligeant que nous offrons quotidiennement à nos élèves et qui me fait honte. J’aime mon métier par-dessus tout mais il ne m’est plus possible, dans ces conditions, de continuer de l’exercer et j’ai perdu tout espoir que cela ne change. C’est pourquoi, Monsieur le Proviseur, j’ai l’immense regret de vous présenter ma démission. »

Le sentiment de gâchis était trop grand : « J’étais en train d’y laisser ma peau. » Aujourd’hui en reconversion, Martine refait des projets. Le drame de Béziers lui a rappelé dans quelle situation vivent beaucoup de profs. En 2009, 54 suicides au sein d’un établissement scolaire ont été officiellement recensés.

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